Jacques Josse

D’une rencontre parmi d’autres.

D’étranges braises couvent dans ses yeux. Il regarde au loin. Reste assez silencieux. Près de lui, Le Bayon s’active à peine. Il gueule quand même après les mouettes, histoire d’essayer d’enrayer le concert. Je les suis à distance. Les ai laissés prendre un peu de champ. Je suis avec eux à Belle-Île pour une semaine. On a passé une bonne partie de la nuit précédente dans la boulangerie à Momo qui bossait au fournil avec ses frères et vers quatre heures du matin, travail terminé, si mes souvenirs sont exacts, on a dû déboucher une bouteille de Muscadet et déguster des croissants chauds sur un bout de table en ferraille…
Je ne réussis à expliquer pourquoi, mais quand j’essaie de revivre au ralenti certaines de mes rencontres avec Alain, lui que j’ai connu grâce à un bon de commande inséré dans la revue « Vrac » (que j’avais rempli et expédié à son adresse fin des années 70 de façon à me procurer La suie-robe des sentiers suicidaires) c’est toujours celle-ci qui rapplique. Peut-être parce que depuis Momo est mort (happé par une vague alors qu’il pêchait sur un rocher aux abords de l’île) et que je n’ai jamais su remettre mes pas en marche dans ces parages, au beau milieu de l’Atlantique… Je ne sais pas. En tout cas, la scène revient et déboule sans cesse, à l’improviste, entortillée là-haut à la manière de ces volutes de fumée qui traînent en spirales, de la table au plafond (à la fin il n’en reste bien sûr qu’une seule) dans un bar de préférence puisque c’est là que l’on aime se réfugier pour sécher nos (déjà presque) vieilles peaux…

Jacques Josse

1 commentaire:

  1. alain roussel6/04/2010

    Suie-robe des sentiers suicidaires, oui, ça j'ai aussi. Tiens, je vais le relire. Alain R

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