Lance n’est pas venu en mer sur « l’Ikaria ». Les Affaires maritimes ne nous autorisent pas à embarquer des passagers en hiver. C’est trop dangereux. Il est cependant venu à bord dans le port. Il voulait voir comment c’était foutu un bateau de pêche breton. Il trouvait l’habitacle vachement exigu. Il s’est marré en visitant le poste d’équipage et m’a dit : « lorsque je ne saurai plus où aller pour me planquer du FBI, je viendrais volontiers me réfugier sur ton bateau. Et si t’as des problèmes avec les fédéraux d’ici, je t’accueillerai dans mon tipi en Oklahoma, OK ? » « No problem, brother », que je lui ai répondu et on est allés siroter quelques bières bretonnes dans un des nombreux bistrots du port pour arroser notre nouveau traité.Une autre fois, nous nous baladions sur le rivage. Les vents du large soufflaient fort depuis plusieurs jours et la mer était grosse. Lance avait du tabac et de petits cailloux d’Oklahoma dans une bourse qu’il portait autour du cou. À un moment, il s’est tourné face à l’océan, a déposé quelques brins de tabac dans l’eau et a jeté deux ou trois petits galets dans les vagues. Il a ensuite médité quelques minutes puis est venu vers moi et m’a dit : « J’ai parlé pour toi à l’océan, brother. Demain tu pourras retourner en pêche en toute sérénité ». Ce fut un grand moment de partage et d’émotion. »
Lecture de "Ombre rosse" par la poète cheyenne Lance Henson en 2005
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire